La vie peut parfois réserver de grande surprise. Parfois même, avec l'aide du destin et d'un grand hasard, elle vous accorde une seconde chance. Une chance que vous devez saisir. Ou peut-être est-ce simplement le karma. Samaël n'avait jamais laissé une chance lui filer entre les doigts. Mais rien n'avait autant d'enjeu que de revoir celle qui avait réussi à briser sa carapace et de tenter de reconquérir son coeur. Une perte de mémoire arrivait au bon moment, mais qui l'obligeait à en profiter un maximum. Elle ne se souvenait de rien. Ni de ses erreurs, ni de ses tromperies. Pas même de Matthéo. Serait-ce mal de tenter de retrouver ce sentiment qu'il avait perdu en la quittant ? Pour lui, il n'y voyait que du bien. Égoïstement, il ne pensait à rien d'autre qu'à lui. Son bonheur avant celui des autres. Son bonheur et celui de Rosie. Elle avait été heureuse avec lui, dû moins, il avait toujours vu dans ses yeux une lueur de bonheur lorsqu'elle était près de lui. Une lueur qui s'était éteinte le jour où il était parti en lui disant que c'était terminé.
Ce matin-là, il avait décidé que le jour était enfin venu de se confronter avec ce qui aujourd'hui ressemblait à sa plus grande peur. Ses sentiments. Lui qui les avait longtemps reniés pour faire de sa vie n'importe quoi, il ne pouvait pas nié que Rosie était différente des autres. Elle n'était pas les autres, tout simplement. Elle était différente. Ses cheveux roux, sa peau blanche, elle était parfaite à ses yeux. Et jamais personne n'a su égalé tout ce qu'il a pu ressentir pour elle. Jamais personne n'est arrivé à la cheville de Rosie. Et il savait pertinemment qu'il n'y aurait personne d'autre pour la remplacer. Il pourrait se marier, avoir des enfants avec une autre, il n'aurait que Rosie en tête. S'en était ainsi.
Il avait marché jusqu'à son immeuble. Simon, son meilleur ami et frère de Rosie lui avait donné l'adresse il y a quelques temps dans l'espoir qu'il ferait quelque chose. Qu'il se bouge pour la récupérer. Un truc du genre, il fallait croire. Le numéro 65, dans cet immeuble. La rue était vide, quasiment. Il y avait en face, une jeune femme faisant son jogging qu'il ne manqua pas de regarder passer, un sourire en biais. Sur le même trottoir que lui, un homme avec un attaché-case marchait vite, une oreillette dans l'oreille. Il hurlait presque. Il y avait aussi une vieille dame qui promenait son chien - ou du moins, le chien promenait la vieille dame. Devant la porte, il attendit, combien de temps ? Il n'en savait rien. Plusieurs minutes. Il regardait l'interphone. Tu vas pas te dégonfler maintenant, tu y es presque. Dans le pire des cas, elle t'enverra sur les roses, dans le meilleur des cas, tu pourras entrer., pensa-t-il alors qu'il regardé le bouton avec insistance.
Le destin marqua un nouveau point quand la porte s'ouvrit. Ce n'était pas Rosie, ce serait trop simple. Bien trop simple. La personne qui l'avait ouverte était un jeune homme de son âge qu'il ne connaissait pas. Il avait les bras chargés. En personne généreuse, il prit le soin de lui tenir la porte avant de s’engouffrer dans l'immeuble et de chercher l'appartement 65.
Il n'avait pas mis longtemps à trouver la porte ornée du numéro de son appartement. Une grande respiration, il frappa deux coups et attendit. Il avait peur. Samaël, l'homme qui n'a jamais eu peur de rien commençait à avoir peur alors qu'il n'y avait rien de bien méchant derrière cette porte. Rosie n'était pas folle au point de l'effrayer. Sam, courage ! Courage. C'est la chance de ta vie. Personne ne répondit. Personne ne lui ouvrit. Peut-être n'était-elle pas chez elle à ce moment précis. Il se devait de l'attendre. Il s'installa sur le sol et pria pour ne pas passer sa journée ici.

Il voyait les minutes s'envoler sur son téléphone portable. Il recevait des appels de client exigeant. L'architecture lui plaisait mais qu'est-ce qu'il aimerait envoyer certains de ses client sur les roses. Chiant, arrogant. Parfois pire que lui. Au bout d'une heure, alors que ses fesses commençait à le faire souffrir, il se releva, prêt à partir. Il reviendrait. Il n'allait pas attendre indéfiniement qu'elle revienne. Peut-être avait-elle déménagé. Alors qu'il s'apprêtait à marcher, il vit l'objet de sa visite dans l'escalier. Sa chevelure rousse. Tétanisé, il ne bougea pas. Il se contenta de prendre appui au mur. C'est rien, c'est rien. C'est juste Rosie. Lorsqu'elle entra complètement dans son champ de vision, son coeur manqua un battement. Il la trouvait encore plus belle que la dernière fois qu'il l'avait quitté. Un sourire s'afficha sur ses lèvres, faible mais sincère. « Bonjour Rosie. » Belle entrée, bravo. Ridicule.